Avec le débat sur la loi »séparatisme », le mouvement La République en Marche se lance délibérément à l’assaut des voix d’extrême droite avec une nouvelle stratégie : se placer à la droite du Rassemblement National.
Une tactique qui n’a pas échappé à Marine Le Pen lors de son débat télévisé du 11 février avec Gerald Darmanin, qui lance à celui-ci, à propos de son son livre « Le séparatisme islamiste, manifeste pour la laïcité » : « à part quelques incohérences, j’aurais pu signer le livre ». Les électeurs d’Emmanuel Macron, en grande partie de gauche, apprécieront.
Ce n’est pas le fait d’être sur la même longueur d’onde que Marine le Pen qui a piqué le Ministre de l’Intérieur, c’est de ne pas se démarquer d’elle. Alors, contre toute attente, il renchérit : « Dans sa stratégie de dédiabolisation, Mme Le Pen en vient à être quasiment un peu dans la mollesse, il faut reprendre des vitamines. (…) Vous êtes prête à ne pas légiférer sur les cultes et vous dites que l’islam n’est même pas un problème. »
Le message est clair : « le représentant de l’extrême droite, c’est moi, et le problème, c’est l’islam. »
D’ailleurs, dans un sondage commandé cette semaine par le mouvement LREM à Ipsos auprès des adhérents en Marche, il est demandé à ceux-ci s’ils considèrent que l’Islam est compatible avec les valeurs de la République.
Pour nombre de militants de base du mouvement, cette droitisation du mouvement sonne comme une trahison. Un sentiment que Benoît Hamon évoque lors d’une interview à France Info
D’ailleurs, Gérald Darmanin ne cache même plus ses intentions. Au cours du même débat avec Marine Le Pen, il déclare que la loi est faite « contre les personnes radicalisées, et c’est fait pour faire en partie plaisir aux représentants du Rassemblement National ».
Cette stratégie de dépassement par l’extrême droite sera-t-elle payante pour les présidentielles de 2022 ? Pas sûr. que les électeurs du RN se laissent prendre à ce qui ressemble à une manoeuvre électoraliste. D’ailleurs, lors du débat, Marine Le Pen a tenu à préciser que Gerald Darmanin faisait fausse route en essayant de plaire aux électeurs RN, qu’elle présente comme des « patriotes » et non comme des islamophobes. : « Je n’entends pas m’attaquer à l’islam, qui est une religion comme une autre et [pour laquelle], parce que je suis profondément attachée à nos valeurs françaises, je souhaite conserver sa liberté totale d’organisation et la liberté totale de culte. »
« Singeant ce qu’ils croient être nous
Et se couvrent, les pauvres fous
De ridicule » (Charles Aznavour, « Comme ils disent »)
Abdeljallil Asmar