LA COMMUNAUTÉ MUSULMANE DES PYRÉNÉES ORIENTALES CHOQUÉE PAR L’INVITATION FAITE AU RECTEUR DE LA MOSQUÉE DE PARIS

Annoncé le 1er février au Mémorial du camp de Rivesaltes, dans les Pyrénées Orientales, à l’invitation du Prix Mare Nostrum, « le recteur de la mosquée de Paris pourrait être reçu par un comité d’accueil quelque peu hostile », écrit le journal local « L’Indépendant » du 29 Janvier.


Ce quotidien fait état de « l’inquiétude » et de la « colère » provoquées dans la communauté musulmane par l’invitation à une cérémonie où seront présents l’évêque du diocèse et un représentant de la communauté juive de la région. Ces derniers sont habitués à inviter les responsables de mosquées avec lesquels ils dialoguent depuis fort longtemps. L’« oubli » de ces responsables communautaires locaux étonne d’autant plus qu’il y a parmi ces derniers des recteurs et imams très instruits et dont les interventions sont appréciées par tous. La plupart dirigent la prière collective en arabe classique, alors qu’ils ont une formation moderne de médecins, d’ingénieurs ou de professeurs.

Lorsque le recteur de la mosquée de Paris a demandé à être reçu par eux avant ou après la cérémonie du Mémorial, les responsables des salles de prière sollicités exigèrent qu’il dirige la prière collective et qu’il s’adresse aux fidèles en arabe sur un sujet de son choix, de préférence religieux en évitant les sujets politiques qui le passionnent depuis qu’il dit avoir reçu « la feuille de route du président Tebboune » concernant « l’Islam de France ». N’ayant pas obtenu satisfaction sur ces points, la mosquée d’une grande ville du département a refusé de le recevoir. Le « Directeur Général » de la mosquée de Paris a réagi immédiatement et a vengé cet affront en ordonnant à l’imam détaché d’Algérie de cesser de diriger la prière et de quitter les lieux. Cela en dit long sur les méthodes de ce bureaucrate qui avait l’habitude d’intimider les imams et gestionnaires de mosquée qu’il terrorise depuis des années.

Aussi bien les chefs communautaires musulmans que leurs interlocuteurs chrétiens et juifs s’étonnent qu’à une telle cérémonie le recteur de la Mosquée de Paris soit le seul à venir d’aussi loin. Cela est interprété comme un manque d’égards pour des musulmans qui connaissent tous l’islam mieux que cet ancien avocat forfaitaire de plusieurs consulats algériens.Il semblerait que l’invitation du recteur contesté ait été imposé par l’éditeur parisien qui viendra décerner un prix littéraire à l’auteur d’un livre sur l’apport des Juifs à la France.

Beaucoup estiment que Drancy aurait été un endroit préférable pour l’attribution de ce prix. C’est de la gare de cette ville que partirent les trains de la mort vers les camps en Allemagne. Les musulmans participèrent à ces célébrations en compagnie de leurs interlocuteurs juifs qui veulent bien les inviter pour associer l’Islam au « devoir de mémoire ». Mais l’éditeur semble avoir évité Drancy parce que c’est Chalghoumi qui aurait été la vedette et cela aurait privé le recteur de la mosquée de Paris d’une bonne occasion d’être médiatisé surtout après les déconvenues consécutives à sa participation le 23 octobre 2023 à une émission sur Gaza de BFMTV, qui provoqua un tollé dans tout le monde musulman.

Cette insistance à imposer le recteur à toutes les cérémonies est aussi le signe de l’échec de certains artisans des dialogues interreligieux qui, malgré une expérience de plusieurs décennies, n’arrivent pas à mettre en confiance d’autres interlocuteurs issus d’une communauté de six millions de membres.

La cérémonie du Mémorial de Rivesaltes est vivement critiquée par les musulmans de la communauté harkie, dont certains ont grandi jusqu’aux années 70 dans ce camp où furent parqués des républicains espagnols dans les années 30, des Juifs dans les années 40 et les suspects du FLN dans les années 50 et jusqu’en 1962. En se sentant exclus de cette célébration, les fils de harkis accusent les organisateurs de vouloir effacer les traces du passage de leurs parents dans ce qu’ils appellent les « camps de la honte ».

Leur colère se trouve aggravée par la perspective de la venue de Paris d’un recteur qui a habitué ceux qui lui reprochent son manque de légitimité religieuse et ses méconnaissances de l’Islam et de l’islamologie à invoquer la mémoire de son « frère chahid » (information restée invérifiable) et de sa sœur Nassima qui aurait été agent de liaison de la Zone Autonome d’Alger.

Cette colère et ces inquiétudes rappellent enfin l’existence des Français musulmans aux auteurs médiatisés d’essais peu scientifiques sur « la mouvance de pensée des Frères musulmans » et, plus récemment, sur « les Fréristes ». Le parti-pris de ces auteurs engagés contre les décoloniaux les amène à passer sous silence les souffrances des Français musulmans qui furent plus mal accueillis que les Pieds-Noirs et les Juifs d’Algérie réunis.

Face à la polémique, le recteur de le Grande Mosquée de Paris, a finalement renoncé à se rendre à Rivesaltes, et n’assistera pas à la remise du prix « Mare Nostrum » à « Histoire juive de la France ».


Sadek SELLAM

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