MARIAM de Faiza Ambah

Mariam, le film de Faiza Ambah est un double événement. 

En premier lieu, parce qu’il s’agit du premier film réalisé en France, et en français, par une réalisatrice saoudienne.

Ensuite, parce que Faiza Ambah pose un regard à la fois tendre et éclairant sur un problème qui n’épargne pas la France : celui de la liberté refusée aux femmes  d’être simplement ce qu’elles sont.

Mariam film

L’histoire est celle d’une brillante écolière qui se voit, au nom de la loi du 15 mars 2004, imposer le choix de retirer son hijab ou de se voir refuser l’entrée dans sa classe.

Là où le propos aurait pu être polémique, Faiza Ambah a réussi un film juste, tendre, drôle et grave à la fois.

Tout en nuances, son récit illustre les contradictions d’une société française qui, d’une part, manifeste sa difficulté d’accepter sa propre réalité multi-cuturelle en se repliant sur elle même et en donnant de la laïcité une interprétation radicale, et qui, d’autre part, vit douloureusement une situation quasiment schizophrénique : une volonté d’apparaître comme un porte parole de la liberté, et la promulgation de lois liberticides.

Mariam est une jeune fille attachante, avec ses joies, ses peines de coeur de lycéenne, qui ne comprend pas les préjugés des adultes censés pourtant lui apprendre les valeurs gravées au fronton de l’école : Liberté, Egalité, Fraternité.

Elle ne comprend pas ses parents, d’origine arabe, qu’elle voit courber l’échine devant les manifestations islamophobes, ni ses professeurs, qui éprouvent eux-même de la peine à justifier ce que la loi leur impose, même si, et c’est bien là le paradoxe, ils croient bien faire. « On vous demande d’enlever votre voile, parce que l’école, c’est la liberté. Personne ne vous obligera à faire ici que qu’on pourrait vous imposer chez vous. Vous savez ce que je veux dire ? » explique aux élèves étonnées le directeur d’école.

La force de ce film est qu’il a su parfaitement éviter l’accueil du manichéisme ou de la démonstration. Il ne s’agit pas d’un plaidoyer pour le voile à l’école, mais d’une chronique de la vie quotidienne d’une adolescente. Et si plaidoyer il y a, c’est seulement celui pour le droit d’être soi-même, tout simplement.

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D’ailleurs, la réalisatrice saoudienne a elle-même choisi de ne pas porter le hijab à un moment où cela était difficilement imaginable en Arabie Saoudite. Aujourd’hui, les réformes entreprises par le gouvernement font de la liberté vestimentaire quelque chose de totalement admis. Ce n’étaiot pas le cas à l’époque. Elle est, dans son pays, une figure de la lutte pour l’émancipation des femmes, et c’est à ce titre aussi qu’elle a fait ce film. Car même en France, c’est encore les femmes qui sont l’objet d’interdictions ou d’obligations vestimentaires.

En France, le sujet reste épidermique. Faiza Ambah a eu les plus grandes difficultés à tourner dans une véritable école.  Les directeurs des établissements contactés ont d’abord demandé si le film était « pour ou contre le port du voile ».

Finalement, la jeune Mariam ne va pas se rebeller, mais placer, à sa manière, les adultes devant leurs propres contradictions.

Un film frais, drôle, touchant, d’ailleurs tiré d’une histoire vraie. Il a été projeté à l’UNESCO et lors de débats sur la liberté des femmes. Il mériterait une distribution plus large.

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