Le 20 septembre 2024, le grand auditorium de l’UNESCO, à Paris, accueillait un concert extraordinaire à plus d’un titre. 80 musiciens, français et chinois et 80 choristes français ont interprété « Earth, Home » (La terre, notre maison), une symphonie avec choeur écrite et dirigée par le chef d’orchestre Wang Ning .
Ce concert était produit et organisé par l’association « Melody for Dialogue Among Civilisations », avec le concours, pour la France, des agences KRP et Aube.
Un orchestre entièrement constitué de moines bouddhistes
Les musiciens chinois sont ceux de l’ Orchestre symphonique Jinghui de Madagascar, le premier orchestre symphonique composé uniquement de moines bouddhistes. Leur mission : faire connaître la culture traditionnelle de l’Asie de l’Est, fondée sur la vérité, la bonté et la beauté, au service de la paix mondiale. Depuis sa création, l’Orchestre symphonique Jinghui s’est produit dans de nombreuses villes chinoises, notamment à Pékin, Shenzhen, Hong Kong, Tianjin et au Shandong, ainsi qu’à l’étranger, notamment en Inde, au Népal, au Sri Lanka, à l’île Maurice et aux États-Unis, et aujourd’hui la France.
Il était, pour ce concert, associé aux musiciens français de l’Orchestre Symphonique Bel’Arte et au Grand Chœur ArteLab de Versailles, avec, en solo Fabienne Conrad (soprano), Paul Gaugler (tenor), Mael Worms (enfant soliste), Camile Perrain (enfant soliste), et Xiangjie Liu (chanteur pop singer).
La représentation était illustrée par de monumentales images immersives crées par Xue Let et Zhao Bozuo.
Né en 1954, le compositeur et chef d’orchestre Wang Ning dirige le département de composition du Conservatoire de Pékin. Il est l’auteur de plusieurs opéras, symphonies, concertos, pièces pour orchestre de chambre, pour le chœur et pour la voix, ainsi que des œuvres de musique éléctro-acoustique. Ses oeuvres mêlent des éléments de musique traditionnelle chinoise et de musique occidentale.
La première symphonie dédiée à la préservation de l’environnement
La Symphonie n° 9, Op. 55, « Earth-Home » pour orchestre, chœur et chanteurs solistes de Wang Ning est la première symphonie au monde à thème environnemental.
Pour le compositeur, les questions environnementales sont liées au destin et à la survie future de l’humanité. L’écosystème actuel se détériore de jour en jour, et les dommages causés à l’environnement par la cupidité humaine provoqueront une crise existentielle pour toutes les espèces. « Comment prendre soin et protéger la Terre, notre seule maison ? Il est temps que nous nous posions cette question sérieusement et que nous agissions » martèle Wang Ning. « La raison est très simple : s’il n’y a pas de montagnes vertes et d’eaux vertes , quel sens pourraient avoir des montagnes d’or et d’argent ? Bien que le développement économique soit une priorité, l’environnement ne peut être sacrifié au nom de la croissance. J’espère que grâce à cette œuvre musicale, nous rappellerons à l’humanité – des gouvernements à tous les citoyens – que nous devons prendre soin de l’environnement, le protéger et chérir les ressources de la Terre car c’est la seule maison que nous partageons. La protection de cette patrie doit commencer par chacun d’entre nous »
La symphonie Earth·Home utilise le langage de la musique pour nous sensibiliser et nous avertir de la détérioration de l’environnement écologique et de ses conséquences sur notre survie . Elle exprime une profonde préoccupation pour l’avenir de la Terre et le destin de l’humanité, depuis l’origine de la vie sur Terre jusqu’à nos jours.
La symphonie évoque les débuts de notre planète, la formation de son écosystème, puis l’arrivée de l’homme, jusqu’à ce que, poussé par son avidité, il commence à piller les ressources de la Terre et détruire son écosystème. Elle comprend neuf mouvements :
I – « Origine » : La Terre naît, le monde primordial (hongmeng) commence à fleurir et l’écosystème de la Terre se forme.
II – « Vie » : Les êtres se reproduisent et forme le tissu vivant.
III – « Patrie » : Ciel bleu et nuages blancs, rivières et lacs, oiseaux et animaux, arbres verts et fleurs recouvrent la terre. Il y a des milliers d’hectares de terres fertiles, de l’eau et de l’herbe en abondance, du bétail et des moutons partout, La terre est pleine de vitalité. La Terre mère nous nourrit pour que nous puissions prospérer.
IV – « Colère » : La destruction et la dévastation causées par les êtres humains à la Terre et à toutes ses espèces, y compris aux êtres humains eux-mêmes ! La cupidité, l’extorsion, le pillage et la destruction des humains représentent une grave menace pour tout ce qui se trouve sur la Terre. Les champs sont désolés, les arbres sont coupés, les vents violents ont tout balayé. La terre est couverte de sable jaune, les lacs sont secs, aucune herbe ne pousse – notre patrie est complètement désolée. Les rivières changent de couleur, le ciel est plein de smog et il n’y a nulle part où se cacher. Le ciel s’est effondré, les bombes ont volé partout et les maisons sont dévastées, ruines sur ruines. Aucun être vivant n’est épargné ; le mal s’étend à toute vie. L’humanité est détruite par sa propre cupidité.
V – « Le monde actuel » : L’écosystème a été gravement endommagé et la Terre est dévastée. Autrefois, les rivières ondulaient de vagues bleues qui nourrissaient la croissance de toutes choses, et le soleil et la pluie remplissaient la Terre d’espoir. Comment se fait-il que tout ait été emporté par le vent ? Pourquoi ? Notre belle maison – s’il vous plaît dites-moi pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi avez-vous changé ?
VI – « L’éveil du monde » : Ah ! Mère Terre, qu’est-ce qui ne va pas chez vous ? Votre corps est meurtri et dévasté. Maintenant, vous êtes maigre et hagarde à cause de la faim, marquée par les cicatrices et mourante.
VII – « La fin du monde » : Mère Terre, je suis votre enfant. J’ai besoin de votre nourriture et je ne peux pas vivre sans vos soins. Sans vous, je ne sais pas où sera mon avenir. Je devrai quitter ma maison et trouver un autre endroit où je pourrai survivre.
VIII – « Renaissance » : Un chant pour l’humanité. L’éveil de l’humanité au prix de la destruction. Arrêtez d’être sans cesse avides ! Ce n’est que lorsque toutes choses sont prospères que vous pouvez avoir un avenir ! L’humanité a subi une catastrophe écologique. Nos maisons sont en ruines. Nous avons tout détruit. Réveillez-vous, arrêtez d’être avides, aimez tout et protégez votre maison.
IX –« Protégez notre maison » : La Terre est notre seule maison. Nous sommes sans abri sans vous. Protéger notre environnement, c’est nous protéger nous-mêmes.
L’association « Melody for Dialogue Among Civilizations »
Depuis plus d’une décennie, l’association a consacré ses efforts à travailler sur une nouvelle approche des objectifs de développement durable (ODD), contribuant à un monde plus harmonieux et à une paix durable, notamment à travers la musique. Elle a reçu le prix Aspen Diplomacy Award en 2012.
« Nous sommes mis au défi de définir et d’encourager une nouvelle approche pour la préservation de notre planète. Ce concert est un appel à l’aide, il nous rappelle que notre survie est liée à la survie de notre Terre. » a souligné sa présidente, Mehri Madarshahi.
Cet événement, qui met en lumière la nécessité d’oeuvrer pour un développement durable, devrait interesser les pays qui s’investissent dans ce domaine, comme par exemple l’Azebaïdjan, qui organise cette année la COP29, l’Arabie Saoudite, qui a progressé de 27 places dans le classement des émissions de carbone, et les Émirats Arabes Unis, notamment Abu Dhabi, très impliqué dans les processus écologiques, en particulier avec le projet Masdar City. La présence au concert de Ferrouze Gadery, célèbre découvreuse de talents, notamment dans le domaine musical, qui, depuis plusieurs années a réussi à établir des ponts culturels entre l’occident et les pays du Golfe, n’est peut-être pas un hasard.
Photos : Alexandre Kobbeh © 2024