La Cour pénale internationale (CPI) a émis jeudi des mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et l’ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Le chef de la branche armée du Hamas Mohammed Deif est également visé.
En préambule, la Chambre préliminaire N°1 de la Cour Pénale Internationale avait pris une première décision rejetant les deux demandes faites par les autorités israéliennes le 26 septembre 2024 qui d’une part contestaient la compétence de la Cour à l’égard de la situation dans l’État de Palestine et d’autre part demandaient à la CPI de refuser les demandes de mandat d’arrêt pour M. Benyamin Nétanyahou et M. Yoav Gallant, présentée par l’Accusation le 20 mai 2024.
Les mandats d’arrêt ont été classés « secrets », afin de protéger les témoins et de garantir la conduite des enquêtes, a déclaré la cour. Mais la CPI « considère qu’il est dans l’intérêt des victimes et de leurs familles qu’elles soient informées de l’existence des mandats ». La CPI ne disposant pas de moyens coercitifs, cette décision n’aura d’effet que si elle est appliquée par les pays membres de la cour (ils sont 124). Ceux-ci sont théoriquement obligés d’arrêter Netanyahou sur son territoire. En Europe, les Pays-Bas, la France, l’Espagne, la Belgique et l’Irlande ont déjà fait savoir qu’ils appliqueront ce mandat d’arrêt.
Le gouvernement israélien a aussitôt accusé la CPI d’avoir « perdu toute légitimité » avec ses mandats d’arrêt « absurdes ». « C’est un jour noir pour [la CPI], qui a perdu toute légitimité à exister et à agir », a réagi le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saarsur son compte X, ajoutant que Le tribunal de La Haye « s’est comporté comme un jouet politique au service des éléments les plus extrêmes oeuvrant à saper la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient« .
Rappelons que les chiffres officiels des massacres de Gaza, bien que probablement sous-estimés, sont alarmants. Selon l’ONG OXFAM, « le bilan annuel des femmes et des enfants tués par Israël à Gaza dépasse celui de tous les autres conflits récents. » . Selon l’organisation, « plus de 6 000 femmes et 11 000 enfants ont été tués par l’armée israélienne à Gaza au cours des douze derniers mois. Ce nombre record de femmes et d’enfants tués à Gaza n’inclut pas les quelque 20 000 personnes non identifiées, portées disparues, ou ensevelies sous les décombres. Les bombes israéliennes touchent en moyenne : Des maisons toutes les quatre heures, des tentes et des abris temporaires toutes les 17 heures, des écoles et des hôpitaux tous les quatre jours, des points de distribution d’aide et des entrepôts tous les quinze jours ».
La revue médicale The Lancet indiquait que le nombre réel de décès survenus à Gaza pourrait être supérieur à 186 000 si les décès indirects, notamment dus à la famine et au manque de soins de santé, étaient pris en compte. Seuls 17 des 36 hôpitaux de la Bande de Gaza sont partiellement fonctionnels, tous sont confrontés à une pénurie de carburant, de matériel médical et d’eau propre. Une estimation cohérente, selon Médecins du monde.
Pourtant, depuis le début du conflit, les pays européens n’ont eu cesse de soutenir Israël dans ses attaques contre les civils de Gaza, tandis que les medias mainstream français justifiaient à longueur de colonnes et d’antenne les massacres génocidaires perpétrés par Netanyahou et son gouvernement. Paradoxalement, aucune image des atrocités commises par Tsahal n’a été diffusée en France, alors que celles-ci sont omniprésentes sur les chaînes américaines, démontrant ainsi la vassalité des medias français à l’égard du puissant lobby israélien.
Mais il sera difficile, pour les pays membres de la CPI de s’aligner sur la position israélienne, sous peine de mettre en évidence l’influence des « sayanim » (agents officieux du mouvement sioniste) sur la politique occidentale.
En Israël, cette décision fragilise encore plus la position du premier ministre, aujourd’hui ouvertement accusé par une partie du peuple et des journaux israéliens d’avoir sciemment instrumentalisé, voire provoqué, l’attaque du 7 octobre pour se maintenir au pouvoir en dépit de ses problèmes judiciaires. La société israélienne est désormais plus divisée que jamais, entre les extrémiste messianiques qui rêvent d’un « grand Israël » et ceux qui souhaitent qu’une solution pacifique soit enfin trouvée aux confllts du Moyen-Orient.