Il n’est, semble-t-il pas, de media totalement objectif sur la réalité de l’Islam et des musulmans. Mais en fin de compte, un journaliste doit-il être « objectif », puisque, de toutes façons, il ne peut apprécier les faits qu’à travers son propre regard, son propre vécu. Au moins doit-il être honnête. Et honnêtes, Edwy Penel et ses journalistes, le sont assurément. Mediapart est le seul journal qui ne s’est pas associé au haro contre les musulmans, partagé par tant de ses confrères.
Nous ne résistons pas à l’envie de reproduire ici une remarquable interview de François Burgat sur l’Islam, la violence islamiste, la colonisation.
Quelques phrases que nous avons retenues :
Le lexique musulman n’est pas un lexique religieux, c’est avant tout un lexique endogène, non occidental, autre qu’occidental, mais pas nécessairement anti-occidental, qui vient de ce segment de une société qui n’a pas été obéré, effacé par la présence coloniale. Et c’est cela que nous n’arrivons pas à comprendre.
Un parler « musulman» ne détermine pas un agir musulman. Quand on parle « musulman », on peut adopter dans le champ politique des postures très diversifiées : on peut être radical ou réformateur, on peut être violent, on peut être gentil, on peut être modernisateur ou au contraire très conservateur. Les musulmans emploient un lexique avec lequel ils sont plus à l’aise parce qu’ils ont l’impression qu’ils prolongent, sur le terrain culturel, idéologique, symbolique, le processus de repositionnement, de remise à distance, initiés par les ruptures politiques et économiques des indépendances et des nationalisations.
A moment de notre histoire, nous les Français nous avons confondu les codes de notre culture avec l’universel. Nous avons en quelque sorte ethnicisé l’universel. Nous devons accepter que l’universel puisse être exprimé avec des codes culturels qui sont un tout petit peu différents des nôtres. Autrement dit, nous devons simplement accepter que l’habit ne fait pas le moine.
Pour tourner la page de la colonisation, il faut déjà l’écrire. C’est une carence majeure de l’histoire de France. Il ne s’agit pas de se rouler dans la cendre, mais nous devons reconnaître explicitement qu’il y a eu un processus de domination, que nous avons employé des raccourcis avec toutes les règles éthiques imaginables.
La laïcité ne doit pas être un instrument pour ostraciser une religion plus que les deux autres.
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