La presse est probablement, comme la langue d’Esope, à la fois la meilleure et la pire des choses.
La meilleure si elle remplit sa mission d’informer honnêtement, ne livrant au public qu’une information vérifiée, recoupée, présentée sans arrière pensée. La pire lorsque, répliquant des discours façonnés par des faiseurs de légende, elle se fait instrument de propagande. Lorsqu’elle omet, lorsqu’elle ment, pour servir une cause qu’aucun argument rationnel ne saurait justifier. Alors, il lui est facile de biaiser la réalité et de manipuler un public ignorant et crédule.
Ainsi, nous est offerte une vision de l’Afrique, sous-développée économiquement et intellectuellement, sautant les pages glorieuses de son histoire et de sa culture, oubliant les chapitres de la colonisation, des 11 accords post-coloniaux qui en faisaient le vassal de la France, et du franc CFA qui a permis à celle-ci de piller tranquillement ses richesses.
Ainsi nous est présenté le récit des conflits caucasiens, faisant de l’agresseur la victime, en ne donnant la parole qu’à un seul des protagonistes, et en mobilisant artistes naïfs et écrivains candides, à la manière du « Commitee on Public Information » américain qui inventa, en 1917, pour faire entrer les Etats-unis dans la guerre, la « propagande culturelle ». Si le but était alors louable, l’outil servit plus tard des desseins moins honorables, comme la guerres du Vietnam ou l’anéantissement de l’Irak.
Ainsi enfin, nous sont décrits les mouvements populaires qui secouent régulièrement la France, en masquant les causes sous de prétendues folies destructrices ou de la théorie délirante de l’islamisme séparatiste, et en cachant l’émergence d’une société policière sous le fallacieux prétexte de la protection des « honnêtes citoyens ». « Dormez en paix, braves gens. Le guet veille »
Ceux qui dirigent le monde le savent bien : la plume et plus meurtrière que le canon. Nous assistons sans broncher à la mainmise des milliardaires intégristes sur nos écrans et nos journaux. Il est regrettable que des politiciens censés nous représenter, des journalistes censés ouvrir nos yeux sur le monde, des penseurs auto-proclamés s’en fassent les serviles complices.
Mais au fond, n’est-il pas un peu facile d’attribuer aux « autres » ces dérives totalitaires ou pseudo-démocratiques ?
Prenez vous aussi la plume, « braves gens ». Ne laissez plus les chasseurs écrire votre histoire.
Jean-Michel Brun