QATAR : LA COOPÉRATION AVEC L’EUROPE S’INTENSIFIE

Face aux conséquences de la guerre en Ukraine, l’Europe est à la recherche de nouveaux partenaires de confiance. Dans cette perspective, l’UE et le Qatar s’emploient à renforcer leur coopération, notamment pour permettre à l’Europe de sortir de la crise énergétique, mais aussi dans d’autres domaines, comme l’envoi à Doha de fromages et de produits laitiers.

Les sanctions européennes décrétées contre le gaz et les produits raffinés russes ont affecté et continue d’affecter durement la santé économique et les finances des pays européens qui, après avoir subi les conséquences de l’épidémie de Covid-19 se trouvent confrontés à une explosion de leur facture énergétique et à un risque de pénurie.

Avec la guerre en Ukraine, la question de la dépendance énergétique de l’Europe (sa consommation énergétique dépend pour environ 60% des importations), devient cruciale, d’autant que la Russie était jusque là le principal fournisseur de combustibles fossiles de l’UE.

Il est donc vital pour elle de trouver des moyens de diversifier ses sources d’approvisionnement énergétique afin de réduire son dépendance à l’égard de la Russie. L’Europe se tourne donc vers d’autres partenaires : Etats-Unis, Norvège, Algérie, Azerbaïdjan, et naturellement le Qatar qui fournit 16% des besoins en gaz de l’Union. C’est pourquoi il apparaît essentiel de poursuivre l’accord de coopération qui unit l’Europe aux pays du Golfe depuis déjà plusieurs années.

Déjà en 2018, en pleine crise politique du Qatar avec ses voisins du Conseil de Coopération des Pays du Golfe, l’Europe signait un nouvel arrangement de coopération avec Doha et donnait de l’air au pays victime d’un blocus régional sans précédent. Celui-ci répondait aussi à la stratégie qatarie de diversification de l’économie visant à anticiper la fin des carburants fossiles et le passage aux énergies durables, et visant aussi à renforcer la coopération dans le secteur privé, l’innovation et la recherche. Ce sont des domaines essentiels de la Qatar National Vision 2030, comme ils le sont pour l’Europe.

En visite à Doha au mois de janvier, Bruno Lemaire a annoncé, lors d’une déclaration commune avec l’émir du Qatar, le renouvellement d’un programme d’investissements de 300 millions d’euros entre Bpifrance et la Qatar Investment Authority, le fonds souverain qatari. Selon un rapport conjoint de l’Agence de promotion des investissements du Qatar (IPA Qatar) et de Business France, l’agence nationale d’appui au développement international de l’économie française, le volume des échanges bilatéraux entre le Qatar et la France a dépassé le milliard de dollars par an depuis 2014 et a atteint près de 1,7 milliard de dollars en 2021. Selon les chiffres de la Banque de France, le total des investissements français directs au Qatar sont en constante augmentation et ont atteint 1,16 milliard de dollars en 2021. Plus de 120 entreprises françaises et 80 agences de franchise exercent aujourd’hui au Qatar.

Les investissements qataris sont également très présents en France, dans l’immobilier, l’hôtellerie, le commerce de détail, les transports, la finance, les sports et les loisirs. Le Qatar investit également dans le secteur privé français, qu’il s’agisse de grandes entreprises ou de start-ups.

Au sein de l’Union Européenne, l’Allemagne est aussi un partenaire majeur du Qatar. Alors que le pays recevait 55 % de son gaz de la Russie avant que celle-ci n’envahisse l’Ukraine, Berlin a signé un contrat gazier de 15 ans avec l’entreprise publique QatarEnergy et la société américaine ConocoPhillips, afin d’obtenir 2 millions de tonnes métriques de gaz naturel liquéfie chaque année à partir de 2026.

La coopération entre l’Europe et le Qatar ne se limite naturellement pas aux services liées aux ressources naturelles. En 2021, notamment un accord historique avait été signé entre Bruxelles et Doha en matière de transport aérien, qui prévoyait une ouverture illimitée à Qatar Airways de l’ensemble de l’espace aérien européen. Qatar Airways a été par ailleurs classée pour la quatrième fois de son histoire comme la meilleure compagnie aérienne du monde.

Les récents tapages médiatiques n’ont donc pas entravé la bonne marche des relations économiques entre l’Europe et le Golfe. Au contraire, la Commission européenne a rencontré récemment à Bruxelles une délégation de haut niveau du Ministère de la Santé publique et du Ministère du Commerce et de l’industrie du Qatar pour s’entretenir de l’évolution des relations bilatérales.

Cette réunion a permis de solidifier davantage la relation qui lie l’Europe et le Qatar, et de développer la coopération mutuelle dans des domaines de plus en plus variés, comme par exemple l’alimentation. L’Europe veut envoyer ses produits laitiers et des fromages, réputés dans le monde entier, au Qatar. Les deux partenaires doivent juste s’entendre sur la réglementation sanitaire qui diffère d’un lieu à un autre. Les Européens ont d’ailleurs pu lors de la réunion démontrer le haut niveau d’exigence imposé par l’Europe à ses producteurs. Prochain round de négociations pour s’accorder sur le contrôle qualité en mars quand la Commission européenne se rendra à Doha.

Pour l’Europe, Doha apparaît désormais comme un partenaire fiable sur lequel il devra compter dans un monde de plus en plus instable et imprévisible.

Jean-Michel Brun

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