MACRON FAIT UN « GESTE » ENVERS LES PIEDS-NOIR EN RECONNAISSANT DEUX « MASSACRES » EN ALGÉRIE

Devant un parterre de rapatriés réunis à l’Elysée mercredi 20 avril, Emmanuel Macron a qualifié d’« impardonnable pour la République » la fusillade de la rue d’Isly à Alger en mars 1962, et en estimant que le « massacre du 5 juillet 1962 » à Oran devait être « reconnu ».

« Ce jour-là les soldats français déployés à contre emploi, mal commandés, ont tiré sur des Français (…) Ce jour-là ce fut un massacre », a déclaré le chef de l’état en évoquant la fusillade de la rue d’Isly, dans laquelle des dizaines de partisans de l’Algérie française ont été tués par l’armée en mars 1962. « 60 ans après » ce « drame passé sous silence », a-t-il ajouté, « la France reconnaît cette tragédie ».

Pour Emmanuel Macron le « massacre du 5 juillet 1962 » à Oran, qui toucha « des centaines d’Européens, essentiellement des Français », « doit être regardé en face et reconnu ». « La vérité doit être de mise et l’histoire transmise », a insisté le chef de l’Etat.

Face aux rapatriés, M. Macron a aussi évoqué la tragédie de « ces mois d’adieu et de déchirure ». « Votre arrivée en métropole est un soulagement car vous vous savez ici en sécurité, mais elle n’est pas une consolation, car vous vous sentez vite incompris, méprisés pour vos valeurs, votre langue, votre accent, votre culture ».« Il y a 60 ans les rapatriés d’Algérie ne furent pas écoutés. Il y a 60 ans ils ne furent pas reçus avec l’affection que chaque citoyen français en détresse mérite ». Désormais, a conclut le chef de l’Etat, « le chemin qu’il nous revient de faire est celui de cette réconciliation ».

Ces déclarations s’inscrivent dans une série d’actes mémoriels initiées à l’approche du 60e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie avec les Accords d’Evian puis l’indépendance de ce pays le 5 juillet 1962. Le 20 septembre 2021, le chef de l’Etat avait demandé « pardon » aux « harkis », « abandonnés » par la France. Un projet de loi, actant ce « pardon » et tentant de « réparer » les préjudices subis, est en cours d’examen au Parlement.

La balance mémorielle reste déséquilibrée

Les enfumades des Grottes du Dahra, eau-forte de Tony Johannot

Ces gestes à l’égard des « Français d’Algérie » tels que se désignent eux-mêmes les Français de la métropole venus vivre en Algérie et les anciens colons, ne doivent toutefois pas faire oublier que les Algériens « de souche » étaient également, durant l’époque coloniale, des « Français d’Algérie ».
Ils n’avaient simplement pas les mêmes droits et subirent des exactions sans commune mesure avec celles dont les premiers furent victimes.

On citera pêle-mêle les « enfumades » de Bugeaud et Cavaignac en 1844 et 1845, les exécutions sommaires, l’affaire des crânes du Musée de l’Homme, les massacres Skikda, El-Harrouch, El-Khroub, Beni Oudjehane dans les années 50-60, sans parler des Algériens jetés dans la Seine par les policiers français sous l’ordre de Maurice Papon en 1961.

La balance tragique penche irrémédiablement du côté des exactions de l’armée et de la police françaises contre les Algériens colonisés. C’est la reconnaissance de cette réalité que réclament, depuis longtemps, les autorités algériennes, et qui tarde bien à venir…

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