Les élections présidentielles azerbaïdjanaises qui se sont conclues, le 7 février 2024, par une victoire du candidat sortant Ilham Aliyev, ont suscité un grand nombre de commentaires , et en particulier en France, avec laquelle les relations bilatérales, jadis au beau fixe, ont viré à l’orage à la suite de la guerre de 2020.
Il est vrai qu’un score de plus de 92% des suffrages est quelque chose que les Français n’aiment pas. Ils considèrent en effet qu’un vote qui dépasserait exagérément la limite équatoriale des 50% serait contraire à la démocratie. Même le Général de Gaulle, élu en 1958 avec plus de 78% des voix au suffrage censitaire, s’est retrouvé en ballotage aux premières élections au suffrage universel de 1965.
La France déteste les hommes providentiels. Beaucoup l’ont payé de l’exil ou de la retraite anticipée ! Ce sont pourtant qui, finalement, ont construit le pays.
Ces leaders charismatiques interviennent généralement dans les périodes de crise où le pays divisé, exsangue, a besoin d’une « vision », incarnée par un « guide » pour recoller les morceaux et redynamiser le pays.
C’est notamment le cas en Asie Centrale et dans le Caucase, où 70 ans d’emprise soviétique ont semé le chaos. En Azerbaïdjan, le premier président de la République depuis la chute de l’URSS, a dû s’atteler à rassembler et cimenter la nation, atomisée par la volonté de Moscou en d’innombrables rivalités et ambitions. Heydar Aliyev y est parvenu et ce n’est pas un mince exploit.
Mais le pouvoir russe, et notamment Gorbatchev, qui d’ailleurs l’a reconnu et regretté par la suite, avait fait de l’Azerbaïdjan un pays affaibli, sans armée, et incapable de se défendre contre les appétits irrédentistes de l’Arménie voisine, beaucoup plus choyée par ses tuteurs soviétiques.
S’en est suivi une longue occupation de 30 ans que Heydar Aliyev a eu l’intelligence stratégique de ne pas chercher à combattre afin de concentrer toutes les forces de la Nation à la reconstruction économique et militaire du pays.
Son fils et successeur Ilham Aliyev a poursuivi la tâche. Mais lorsqu’il a estimé que la stratégie de reconstruction avait porté ses fruits et qu’il possédait à présent les forces suffisantes pour libérer son pays, il l’a fait.
Les hauts faits que constituent la guerre de 44 jours et la reprise du Karabakh ont rendu aux Azerbaïdjanais, en même temps que leur intégrité territoriale, leur honneur, leur fierté. Cela explique la participation et le score exceptionnels des élections de 2024. Cela explique aussi la liesse qui s’est emparée de la population le soir des élections, et qui ont laissé les Français pantois et incrédules. Pourtant, comme le souligne la journaliste et politologue azerbaïdjanaise Anastasia Lavrina : « Les gens de toutes les villes sont descendus en procession dans les rues, se réjouissant de la victoire de leur commandant en chef triomphant »,
Le 7 février, Anastasia Lavrina , qui est aussi la première vice-présidente de la communauté russe d’Azerbaïdjan, a visité, en tant qu’observateur, plusieurs bureaux de vote. Elle a noté une participation remarquablement élevée dès le début du processus de vote.
« Tous les citoyens de la République ont reconnu l’importance historique de ces élections et étaient impatients d’y participer. » remarque-t-elle. « Pour la première fois depuis le rétablissement de l’indépendance après la dissolution de l’Union soviétique, des élections ont eu lieu sur l’ensemble du territoire souverain de l’Azerbaïdjan. En 2020, L’Azerbaïdjan est sorti victorieux de la guerre de 44 jours, mettant définitivement fin à près de trois décennies d’occupation arménienne. Les mesures antiterroristes locales rapides et décisives prises par l’Azerbaïdjan en septembre 2023, qui ont duré moins d’une journée, ont abouti au désarmement des forces militaires arméniennes restantes au Karabakh. Aujourd’hui, notre drapeau flotte au Karabakh, symbolisant une victoire profonde pour chaque Azerbaïdjanais », conclue-t-elle.
Ces élections, le président Aliyev avait souhaité anticiper leur date, car il ne voulait pas retarder cet événement exceptionnel qu’est, aux yeux des Azerbaïdjanais, la présence de bureaux de votes dans les territoires anciennement occupés.
Maintenant, Aliyev va devoir réaliser la promesse qu’il a faite aux Azerbaïdjanais : faire de l’Azerbaïdjan un pays économiquement, politiquement et culturellement
Ce que Anastasia Lavrina résume en affirmant que l’Azerbaïdjan entrait dans une nouvelle ère.
« Un Azerbaïdjan fort a besoin d’un leader fort. Un de ces dirigeants est Ilham Aliyev, et le peuple azerbaïdjanais croit en lui. La restauration active des territoires libérés est désormais en cours. Les anciens déplacés retournent dans leurs terres natales. Et aujourd’hui, ils ont voté pour la première fois sur leurs terres historiques. Notre pays bénéficie de la plus grande attention de la communauté mondiale tout entière. Nous devons être capables de défendre notre point de vue et notre position. L’Azerbaïdjan peut le faire. Et même si cela ne plaira pas à tout le monde, nous ne nous écarterons pas du chemin choisi », a conclu Anastasia Lavrina.