Comme chaque année, pour le Hajj, c’est à une véritable mobilisation générale à laquelle l’Arabie Saoudite allait se préparer pour accueillir, du 28 juillet au 2 août, les 2,5 millions de pèlerins venus du monde entier. Les autorités devaient également mettre en place une extension de séjour afin de permettre aux fidèles étrangers de visiter le pays, qui a déployé de gros efforts pour réhabiliter ses principaux sites touristiques.
Mais le Covid-19 est passé par là.
L’appel du CFCM
Le Conseil français du culte musulman (CFCM), dans un communiqué publié jeudi 11 juin, « recommande vivement aux musulmans de France de différer leur projet de pèlerinage à l’année prochaine », en raison des risques sanitaires liées à la pandémie.
Le CFCM appelle également les musulmans français à la plus grande vigilance à l’égard des opérateurs et intermédiaires, afin qu’ils ne leur versent pas d’acompte , car « dans le contexte actuel, la souscription à une assurance n’aura aucun effet dans le cas d’une annulation. »
Il invite d’ailleurs les agences de voyages spécialisées dans l’organisation du Hajj, « dont la responsabilité morale et juridique est immense », à « renoncer cette année à l’organisation du pèlerinage afin de préserver la vie de leurs candidats qui sont souvent d’un âge avancé et donc davantage vulnérables au COVID-19. »
Ce sont en effet environ 25 000 fidèles français qui se rendent chaque année à La Mecque. Certains économisent toute leur vie pour s’offrir ce voyage, qui devient de plus en plus couteux, notamment à cause de l’amélioration des conditions d’hébergement sur place et de la modernisation des infrastructures, qui, certes, rendent le pèlerinage plus confortable, mais qui ont un coût.
Une machine impossible à remettre en marche
Les autorités saoudiennes n’ont pas, à l’heure actuelle, publié de décision nette à propos de la tenue du pèlerinage. Mais nos différentes sources informations concordent : la tenue du pèlerinage demande une organisation considérable qui mobilise, sur toute une année, pratiquement toutes les structures de l’Etat. Délivrance des visas, transport aérien et terrestre, hébergement, travaux publics, approvisionnement en eau, moyens médicaux, agents de sécurité sont tous placés au service du plus grand rassemblement humain ponctuel.
On comprend dès lors qu’après l’interruption de toute activité pendant la pandémie, il est quasiment impossible au gouvernement saoudien de remettre en service cette colossale machine en si peu de temps.
De toutes façons, compte tenu des incertitudes liées à la propagation du virus, de nombreux pays ont également demandé à leurs ressortissants de reporter leur pèlerinage.
Les autorités saoudiennes maintiennent donc encore le doute sur la tenue ou non du Hajj 2020 en raison de la persistance des incertitudes relatives à la propagation du coronavirus. Si le pèlerinage devait être maintenu, ce serait au mieux dans une version très réduite. Les personnes de plus de 60 ans ou souffrant de maladies chroniques en seraient exclues, et la visite traditionnelle à Médine serait supprimée. Ce sera, si la nouvelle est confirmée, la première fois depuis la création du royaume en 1932 que le pèlerinage sera annulé ou drastiquement réduit. Cette décision aura bien sûr un fort impact sur l’économie du pays à laquelle le Hajj rapporte chaque année près de 10 milliards de dollars.
Depuis plusieurs années, le Royaume investit massivement pour faciliter l’accomplissement du 5ème pilier de l’Islam. Des travaux pharaoniques ont été réalisés à La Mecque, avec plusieurs phases successives d’agrandissement de la Grande Mosquée, le creusement de tunnels entre La Mecque et Mina, la création de lignes de chemin de fer, et la transformation du paysage hôteliers. Alors que quelques hôtels et des villages de tentes éphémères abritaient les pèlerins dans les années 80, c’est une véritable mégalopole qui les accueille aujourd’hui.
Coup dur pour les Saoudiens, mais aussi immense déception pour les fidèles, surtout les plus âgés, pour lesquels l’accomplissement du Hajj représente souvent un projet de vie. Mais la plupart des savants approuvent cette décision, car la préservation de la vie est l’un des principes fondamentaux de l’Islam.