LA FRANCE LIMITE LES VISAS AUX ALGÉRIENS, AUX MAROCAINS ET AUX TUNISIENS

Paris a décidé de durcir les conditions d’obtention des visas à l’égard du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie, en rétorsion à l’attitude de ces pays qui, selon Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, «refusent » de délivrer les laisser-passer consulaires nécessaires au retour des immigrés refoulés de France.

« C’est une décision drastique, c’est une décision inédite, mais c’est une décision rendue nécessaire par le fait que ces pays n’acceptent pas de reprendre des ressortissants que nous ne souhaitons pas et ne pouvons pas garder en France », s’est-il justifié sur Europe 1. Le nombre des visas délivrés pour les ressortissants du Maroc et de l’Algérie sera réduit de 50% et de 33% pour ceux de Tunisie.

L’attitude de ces pays « freine l’efficacité des reconduites effectives » à la frontière une fois les obligations de quitter le territoire français (OQTF) délivrées, a affirmé M. Attal. Face à cela, « il y a eu un dialogue, ensuite il y a eu des menaces. Aujourd’hui on met cette menace à exécution», a-t-il expliqué. Évoquant les visites sur ce sujet, dans ces trois pays, du Premier ministre Jean Castex et de membres du gouvernement, dont le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, ainsi que des réunions avec les ambassadeurs des pays concernés, il a fait valoir qu’« à un moment quand les choses ne bougent pas, nous faisons appliquer les règles ».

Interrogé sur la durée d’application de cette mesure, temporaire ou pérenne, le porte-parole du gouvernement français a indiqué qu’elle avait été « décidée il y a quelques semaines » et « va être mise à exécution » pour « pousser les pays concernés à changer de politique et accepter de délivrer ces laisser-passer consulaires ».« On souhaiterait que la réaction soit davantage de coopération avec la France pour qu’on puisse faire appliquer nos règles migratoires », a insisté M. Attal.

Côté diplomatie, cette décision ne va pas arranger les relations, déjà tendues, entre la France et le Maghreb. Au Maroc, la mesure passe mal : « Nous avons pris acte de cette décision, nous la considérons comme injustifiée », a déclaré le chef de la diplomatie marocaine, Nasser Bourita, lors d’une conférence de presse.

Selon le ministère français de l’intérieur, le Maroc n’aurait délivré que 138 de ces documents entre janvier et juillet, avec « un taux de coopération » de 25 %. Faux rétorque Nasser Bourita, « nos canaux consulaires ont délivré près de 400 laissez-passer pour des personnes se trouvant en situation irrégulière durant les huit derniers mois. Le Maroc a toujours réagi de manière pragmatique et stricte avec les personnes qui se trouvent en situation irrégulière. »

Le ministère algérien des Affaires étrangères, quant à lui, a annoncé, mercredi 29 septembre, avoir convoqué l’ambassadeur de France à Alger après la décision prise par Paris de réduire de moitié le nombre de visas octroyés aux ressortissants algériens.

Une décision prise moins de 24h après l’intervention télévisée d’Eric Zemmour

On peut tout de même s’interroger sur la coïncidence entre ces mesures et les prémices de la campagne présidentielle. Façon déguisée de réduire les chiffres de l’immigrtion à quelques mois du scrutin ?

La candidate Marine Le Pen a aussitôt approuvé cette décision, tout en la jugeant trop tardive, tandis que le le président par intérim du Rassemblement National, Jordan Bardella, joue à la fois la convergence et le scepticisme : « on jugera le résultat ».

Précisément, selon Sadek Sellam, historien et grand connaisseur de l’histoire de l’islam en France, « le fait de réduire de moitié les visas pour les ressortissants du Maghreb n’est pas en soi une nouveauté. puisque déjà, les 450 000 bénéficiaires de visas de 5 ans qui avaient été autorisés à venir en France pour des raisons professionnelles ont vu leurs demandes de renouvellement refusées au tout début du quinquennat d’Emmanuel Macron, et cela a été très peu médiatisé.

Ce qui fait l’originalité de la présente décision, c’est qu’elle a été prise moins de 24 heures après les élucubrations d’Eric Zemmour qui manipule les chiffres et l’opinion. Zemmour est en train de devenir le maître à penser de la classe politique, y compris en haut lieu.

Ce qui pose problème c’est l’usage de l’idéologie des 3 i : Immigration, Intégration, Islam, à des fins purement électorales qui anéantit tous les efforts de dialogue dans le sens du vivre ensemble.

Ceci consterne une grande partie des Français qui sont attachés à une France ouverte et généreuse. Cela crée également des tensions avec les pays du sud, et cela contrarie tous les discours sur la coopération, le partenariat, et cela risque d’avoir des retombées dans d’autres domaines que celui de l’immigration »

Cela confirme en tous cas que la droite française a d’ores et déjà réussi à placer la campagne présidentielle sur le terrain de l’immigration. Et il semble que sur cette question, les enchères aient déjà commencé.

Lire aussi

ÉMEUTES EN NOUVELLE-CALÉDONIE, POLITIQUE NÉO-COLONIALE : QUAND LA MAIN GAUCHE DE LA FRANCE IGNORE CE QUE FAIT SA MAIN DROITE

Par Jean-Michel Brun  Gérald Darmanin, le ministre français de l’intérieur n’est pas content, mais pas …