Après le massacre de civils palestiniens innocents lors d’un bombardement de l’armée israélienne sur un camp de déplacés à Rafah ce dimanche, on s’attendait à une réaction forte du gouvernement français.
L’armée israélienne a, selon les ONG présentes sur place, délibérément ciblé un camp situé dans la « zone humanitaire » décrétée par Israël même , dans laquelle les civils sont censés être protégés, faisant 45 morts et plus de 250 blessés. Des images insoutenables ont été immédiatement diffusées sur les réseaux sociaux. On y voit des corps carbonisé, des enfants décapités, démembrés. Le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, s’est dit « horrifié » par ces images. La Maison Blanche, principal soutien de Tel-Aviv, s’est dite « bouleversée » par ces images, tandis que les chaînes de télévisons américaines diffusent en boucle ces images de terreur, renforçant le sentiment anti-israélien qui monte quotidiennement dans l’opinion publique américaine.
Et la France ?
Emmanuel Macron se dit « indigné ». Simplement. Comme on le serait devant un accident de la route provoqué par un chauffard ivre. Mais de sanctions, il n’en n’est pas question. Juste une condamnation prononcée du bout des lèvres, l’évocation d’une reconnaissance d’un État palestinien, mais « au moment utile ». Qu’est-ce à dire ? Lorsqu’il n’y aura plus âme qui vive à Gaza ?
Alors que l’Espagne, l’Irlande et la Norvège viennent de reconnaître officiellement l’État palestinien, comme 75% des pays membres de l’Organisation des Nations unies, la France rechigne. Valérie Hayer, tête de liste « Renaissance » pour les élections européennes insiste encore : « Ce n’est pas le moment de reconnaître la Palestine comme État », enfonçant encore plus la France dans la soumission et le déshonneur.
Heureusement, mardi 28 mai à l’Assemblée Nationale, la députée LFI Alma Dufour met le choses au point : « Alors que la cour internationale de justice a ordonné à Israël de cesser son offensive sur Rafah, une cinquantaine de personnes sont mortes calcinées dans un camp de réfugiés bombardé. Un enfant a été décapité, L’hôpital de Rafah a cessé de fonctionner, et les chars viennent d’entrer dans la ville. Cela va faire huit mois que le monde regarde deux millions de personnes vivre en enfer, car elles sont enfermées sans eau, sans nourriture, sans médicaments, bombardées. Les victimes de cet abattoir à ciel ouvert se filment en temps réel. Hunger Games n’est plus seulement un divertissement. C’est la réalité dans le téléphone de nos adolescents. Bientôt huit mois, et vous n’avez pris aucune sanction contre les assassins. Pire, le soir de l’offensive sur Rafah, au dîner du CRIF Monsieur le Premier ministre, en refusant de sermonner Israël, vous lui avez donné » votre bénédiction. Vous avez préféré au cessez-le-feu le dîner aux chandelles avec le soutien des génocidaires. La porte-parole du gouvernement se prenait en selfie avec un des influenceurs de l’armée israélienne, perdant son dernier Instagram de dignité. Alors que la Norvège, l’Espagne, l’Irlande, reconnaissent aujourd’hui l’État palestinien, vous osez placer la France dans le camp des complices. J’ai mal à ma France, me disent beaucoup de nos concitoyens. Moi aussi j’ai mal à ma France, patrie des droits de l’homme, devenue patrie du droit du plus fort. J’ai mal à ma France des Lumières, qui permet qu’on transforme des gens en torches humaines au nom de la lutte contre l’obscurantisme. J’ai mal à ma France de la Révolution qui défigure la démocratie même en justifiant qu’on affame 2 millions de personnes en son nom. Le Conseil de sécurité des Nations Unies se réunit aujourd’hui. La France doit annoncer la suspension des échanges économiques avec Israël et demander l’intervention immédiate des Casques bleus. Rafah n’est pas qu’une frontière, c’est un miroir. Si vous ne le faites pas, ma question est, Monsieur le Premier ministre : comment pourrez-vous vous regarder dans une glace ?»
Réponse de Franck Riester, ministre du commerce extérieur : « Madame la députée, vous ne pouvez faire abstraction des attaques terroristes du 7 octobre dernier ». La France plonge dans le déshonneur. Alors le député LFI Sebastien Delogu se lève et déploie le drapeau palestinien. La présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, s’étrangle : « Monsieur Delogu, vous avez un rappel à l’ordre avec inscription du procès-verbal jusqu’à saisine du bureau, c’est inadmissible ! ». Le député écopera de 15 jours de suspension.
Ces 15 jours seront les plus glorieux de cette législature.
Sebastien Delogu a eu ce courage que la France soumise n’a pas eu. Et il a montré l’exemple. Le 4 juin, alors que la quasi-totalité des parlementaires de La France Insoumise se sont présentés en vert, rouge et blanc, afin de représenter la Palestine, l’élue du Val-de-Marne Rachel Keke a de nouveau brandi un drapeau palestinien dans l’hémicycle. Mathilde Panot, reprenant une déclaration de Jean-Luc Mélenchon, commenté : « Peu importe les sanctions. Nous ne nous tairons pas».
Ces élus ont rendu à la France un peu de son honneur perdu. Un peu, car à voir les attitudes de Gabriel Attal, Habib Meyer, et Yaël Braun-Pivet, on se dit que nous n’avons peut-être pas encore touché le fond de de la honte et de l’infamie.