par Roland Laffitte[1]
Nicolas Bourbaki (en réalité un collège de mathématiciens français des années 30) disait : « Les statistiques sont l’enveloppe mathématique de l’erreur ». Aujourd’hui, elles sont devenues l’outil politique du mensonge.
En 2024, les services de police et de gendarmerie nationales ont enregistré près de « 16 000 infractions à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux sur l’ensemble du territoire français ». Sur ce nombre 173 faits qualifiés d’« antimusulmans », les actes anti-arabes et antinoirs ne pouvant être distingués, dissimulés qu’ils sont dans le fourre-tout des actes xénophobes[2]. Mais qui peut croire ces chiffres, concernant Musulmans, Arabes et Noirs ?
Tout d’abord, seules les plaintes sont enregistrées[3]. Mais imaginez un jeune de Saint-Denis aller porter plainte auprès de policiers que ses collègues ont traité de boucaque, délicat mot policier combinant bougnoule et macaque ? Cela fait multiplier par bien des fois le nombre de faits racistes réels.
Il y a mieux, ou pire en réalité. Une enquête récente de SOS-Racisme révélait, grâce à un testing effectué sur 136 agences, que 49% des annonces locatives contenaient des mentions excluant Arabes et Noirs[4]. Laissons de côté les HLM dont il est notoire qu’ils pratiquent des quotas ethniques, dont discriminatoires, donc racistes. Si nous avons autour de 800 000 annonces de location, la moitié de ce chiffre donne 400 000. Or ces faits, bien qu’indéniablement racistes, ne sont pas comptabilisés par la statistique de ministère de l’Intérieur. Si l’on en tient compte, il faudrait multiplier les chiffres officiels par 25… Excusez du peu !
Tout cela reste encore dérisoire à côté des actes racistes que constituent les contrôles au faciès. Dans son Rapport du 6 décembre 2023, la Cour des comptes estime qu’environ 47 millions de contrôles d’identité ont été réalisés en 2021, dont 15 millions à l’occasion de contrôles routiers[5]. Si l’on exclut ces derniers, reste 32 millions. Or le Défenseur des droits, institution créée en 2011, faisait état en 2017 de constats attestant de la réalité des contrôles d’identité discriminatoires en France. Une enquête menée sur 5 000 personnes révélait ainsi que les jeunes hommes perçus comme noirs ou arabes ont 20 fois plus de risques d’être contrôlés[6]. Il s’agit bel et bien de racisme policier, ainsi défini par la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) du Conseil de l’Europe : « Utilisation par la police, sans justification objective et raisonnable, de motifs tels que la race, la couleur, la langue, la religion, la nationalité ou l’origine nationale ou ethnique dans des activités de contrôle, de surveillance ou d’investigation »[7]. Naturellement, le « pays des droits de l’homme » est au-dessus de ces considérations spécieuses qui sont une injure à sa bonne foi démocratique et universaliste, qui rappellent de façon déloyale que sa psyché présente encore des signes d’inertie mentale de l’esclavagisme et du colonialisme. Tout cela nous invite à recourir à un petit calcul que ce métèque islamique d’Al-Khwarizmi a grandement facilité en inventant l’algèbre. Certes, il est difficile d’évaluer, sur les 8% de la population, soit 6 millions d’habitants qui se perçoivent comme Noirs, Arabes-Maghrébins, Indo-Pakistanais ou Métis[8], qui est contrôlé au faciès, d’autant plus que tout le monde n’est pas contrôlé et qu’en revanche, beaucoup de gens sont contrôlés plusieurs fois l’an ou même parfois dans la journée. Mais nous pouvons contourner cet obstacle en considérant non les gens contrôlés mais les contrôles eux-mêmes, et nous retiendrons par simple hypothèse, qui ne paraîtra pas déraisonnable, le chiffre de 4 millions. Dans ces conditions, si les contrôles touchent 20 fois plus les « gens à faciès » que le reste de la population, cela donne autour de 16 millions de contrôles au faciès, donc d’actes racistes.
De 16 000 à 16 000 000, rien qu’une multiplication par 1 000 des chiffres donnés par la Ministère[9] ! Mais il n’y a pas en France de « racisme systémique » ou de « racisme d’État »[10] : on l’appelle comme on veut sans le confondre avec le « racisme institutionnel », c’est-à-dire inscrit dans la loi, ce qui une autre question, que la récente loi sur le « séparatisme », qui s’adresse aux Musulmans, vient étayer[11].
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[1] Voir le site www.rolandlaffitte.site
[2] Ministère de l’Intérieur, « Les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux en 2023’, communiqué de presse en ligne du 20 mars 2024.
[3] Sarah Benichou, « Actes antimusulmans » : le grand flou des chiffres du ministère de l’intérieur », sur le site Mediapart, le 2 mai 2025.
[4] Par Isabelle Rey-Lefebvre, « Un testing de SOS-Racisme remet en lumière les discriminations raciales à la location immobilière », publié sur le site du Monde le 22 mars 2022.
[5] Cour des Comptes, « Contrôles d’identité », mis en ligne le 6 décembre 2023.
[6] Défenseur de droits, « Contrôles d’identité discriminatoires et identification des policiers : après la reconnaissance, la Défenseure des droits rappelle l’impératif d’agir », communiqué de presse du 11 octobre 2023.
[7] ECRI, « General Policy Recommendation No.11: Combating racism and racial discrimination in policing », CRI (2007) 39, 2007.
[8] Centre d’observation de la société, « La répartition de la population française selon la couleur de peau », étude mise en ligne le 8 juin 2022.
[9] Je remercie mon ami, le mathématicien Christian Velpry, pour ce calcul.
[10] Voir « Violences policières et racisme : « Circulez, y a rien à voir ! », mis en ligne le 16 mai 2020 sur mon site personnel : www.rolandlaffitte.site.
[11] Voir « le serrage macronien du garrot anti-islamique », dans La France, l’Islam et ses Musulmans, mis en ligne sur mon site personnel : www.rolandlaffitte.site le 29 novembre 2021.